Seul, ou presque [PV Noxi Tirgon]

J’étais installé à une table de la cafétéria. Devant moi se tenais une tasse de café. Elle refroidissait. Je ne la buvais pas. Mes bras étaient croisés sur la table et j’avais posé ma tête dessus.
J’étais perdu dans mes pensées. Cela faisait maintenant un moment que je m’étais installé au manoir, j’avais rencontré quelques personnes, gentilles, d’autres moins voir détestables. Je me demandais ce que je faisais ici. Enfin… c’était toujours la même histoire. Je ressassais les mauvais moments sans penser aux bons. Je m’apitoyais constamment sur mon sort. Pourtant je n’étais pas à plaindre ! En fait, j’étais plutôt content d’avoir trouvé ce lieu étrange.

Et puis il y avait « elle ». Cela ne faisait que depuis peu que je connaissais son sexe. Dans mes pensées sa voix était neutre, indistincte. En revanche lorsqu’elle prenait la parole à ma place, sa voix était celle d’une femme. Je commençais à l’apprécier… très légèrement bien sûr. Il ne fallait pas non plus qu’elle se pointe trop souvent… Enfin... elle m’a quand même sauvé la vie par deux fois déjà et par la même occasion sauvée la vie d’une fille. Je ne savais toujours pas à quoi pouvait-elle ressembler, même si je m’en fichais un peu.

Je redressai la tête. Dans la cafétéria, il n’y avait personne, excepté le barman, qui s’affairait dans sa cuisine. J’étais pour l’instant seul. Tant mieux, je préférais cela. Soudain je me pris à somnoler. Je baillai un grand coup puis fermai les yeux doucement. La dernière chose que je vis fut ma tasse lâchant quelques vapeurs fines. Puis un grand noir naquit. De là émergea une terre. Elle était belle, vaste. Que dis-je ?! Elle était immense et majestueuse, pleine de légende! Je me retrouvai ainsi à parcourir cette terre, à la recherche de quelques quêtes épiques à accomplir.

Le monde des rêves… Un monde où tout est possible. Malheureusement, tout l’était un peu trop…
Tout à coup, sans raison, une grande bataille éclata. J’en étais au cœur, sans arme, j’étais là par hasard… ce fut lorsqu’une lame me transperça de part en part que j’ouvrir les yeux et les écarquillai, l’air paniqué.

Je me trouvais au milieu de la cafétéria. Assis à ma table, sur ma chaise. J’étais essoufflé, en sueur et paniqué par ma vision de mort. Pourtant, cette peur était assez… irrationnelle… Le temps était comme figé. Seules les ondes sur la surface de mon café, maintenant froid, trompaient cette impression.
Rien n’avait changé dans la cafétéria. Le barman paraissait toujours être dans sa cuisine. Si, quelque chose avait changé. Je n’était plus seul.

Si il y avait une chose que Noxi n'oublierait pas, c'était qu'il recherchait quelque chose. Et si quelque chose était sûr, c'était que ce quelque chose était ici. Il ne savait pas comment, mais il le ressentait. Il savait même pas si, en face de la chose, il serait capable de savoir ce qu'elle était, qu'elle était ce truc qui lui avait manqué, qui le retenait ici. Il ne savait pas vraiment s'il avait envie de partir, ce corps était bien, et se transformer en tigre c'était bien aussi, mais en même temps, être fée lui manquait aussi un peu.

Noxi préférait toujours être en extérieur, c'est mieux. C'est plus grand, il y a plus d'espace, il y a plus de chemins pour s'enfuir. Toujours avoir un endroit pour s'enfuir... ça il l'avait appris à ses dépends lorsqu'il avait récupéré un corps incapable de voler. Mais là, il était en intérieur. Pourquoi ? Parce qu'il avait faim et que son âme de fée avait toujours refusé l'instinct de chasseur du tigre. En même temps, une fée qui tuerait des animaux... Enfin bref ! Il s'était donc mis à la recherche de la cafétéria, qu'il trouva sans trop de problèmes. Il avait juste suivi les odeurs de nourriture.

En entrant dans la cafétéria, il avait regardé autour de lui. Pas grand monde ici ! Juste le barman qui bossait et un gars qui dormait devant sa tasse de café. Noxi commanda un truc à manger avant de s’asseoir à la table d'à côté du jeune homme. Il l'observa un moment dormir, après tout il n'avait que ça à faire, et allait détourner la tête et se mettre à manger lorsque l'inconnu se releva en sursaut, suant à grosses gouttes. Il se leva et s'approcha, inquiet.

- Excusez-moi, mais... vous allez bien ?

- Excusez-moi, mais... vous allez bien ?

En effet, je n’étais plus seul. La voix venait de la table d’à coté. C’est avec un léger sursaut que je me retournai vers l’inconnu. J’étais encore sous le choc. J’avais encore l’impression de sentir le fer plonger en moi et ma peau se déchirer. J’observai d’abord l’homme avec de grands yeux, et pour toute réponse un silence. Puis j’entrepris de balbutier quelques mots, d’une voix mal assurée, tout en rougissant de honte, devant l’inconnu qui avait vu la scène.

-Je... crois que ça va… Ce n’est rien. Merci…

Je respirai un grand coup afin de me calmer, tout en détournant le regard, afin de fixer ma tasse. Si j’en avais pris une c’était juste pour avoir une raison de me trouver ici, et d’être seul. Maintenant que je ne l’étais plus, je me tâtais à boire mon café d’une traite.
Je portai la tasse jusqu’à ma bouche, quand un breuvage froid et infect toucha mes lèvres. Je reposai immédiatement la tasse et fit la grimace. Aussitôt je me souvins du jeune homme à côté de moi et pensa qu’il devait bien rire en son fort intérieur…

La tentative de l'inconnu pour le rassurer n'avait pas atteint son but : Noxi ne l'avait absolument pas cru. Il ne fit cependant aucun commentaire, ne voulant pas enfoncer le jeune homme. Il regarda celui-ci essayer de boire son café, qui était bien évidemment froid, vu le temps pendant lequel il avait dormi, avant de le reposer en une grimace. Noxi se doutait bien que ce devait être dégoûtant, déjà qu'il n'aimait pas le café à l'origine... Ceci dit, le tigre s'inquiétait plus sur l'état de son interlocuteur que sur le gout du café, c'est pourquoi il s'installa bien en face de lui et le regarda dans les yeux.

- Vous êtes sûr que vous allez bien ? Vous étiez en sueur tout à l'heure. Vu que vous dormiez et que vous vous êtes réveillé en sursaut, irais-je trop vite en réflexion en supposant que vous avez fait un cauchemar ? Ceci dit, si vous préfériez que je m'en aille, je le comprendrais parfaitement...

Le jeune homme me fixait toujours. Et c'est avec surprise que je le vis s'installer à ma table, en face de moi, l'air sérieux. Il me regarda dans les yeux, puis il pris la parole, d'une voix toute aussi sérieuse que son regard. Je ne pus m'empêcher de détourner les yeux, de honte.

- Vous êtes sûr que vous allez bien ? Vous étiez en sueur tout à l'heure. Vu que vous dormiez et que vous vous êtes réveillé en sursaut, irais-je trop vite en réflexion en supposant que vous avez fait un cauchemar ? Ceci dit, si vous préfériez que je m'en aille, je le comprendrais parfaitement...

En effet, j'avais fait un cauchemar... Mais pas non plus de quoi s’affoler... Ou plutôt que les autres ne s'affolent... Car personnellement, c'est plutôt traumatisant de se voir mourir, surtout qu'en principe, dans la plupart des cauchemars, on sait qu'on va mourir, mais on ne le voit pas, on se réveille. Mais pas là.
Aussitôt, je repris mes esprits et le regarda à mon tour dans les yeux. Bien sûr, la honte de cette scène était toujours visible grâce au rouge sur mes joues, mais c'est à peut près sérieusement que je pus lui répondre.

-Je pense que ça ira. Ce n'était qu'un cauchemar... ou du moins je l'espère.

Je marqua un temps avant de répondre aux dernières paroles de l'inconnu. A l'origine j'étais venu pour être seul, mais là, cela n'avait plus aucun sens, maintenant que la conversation était engagée.

-Non, vous pouvez rester, si vous voulez. Au fait... qui êtes vous?